Polars nantais

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MORSALINE Hervé SARD Editions Krakoen, 2010, collection Forcément Noir. 328 pages. 11€.

Clinique réputée de kerande, sur la côte atlantique, La Bruyère, familièrement appelée Morsaline, accueille des patients souffrant de troubles psychiatriques et comportementaux. Elle loge provisoirement des fils de la bonne bourgeoisie, mais pas que. Un petit monde avec ses règles, son règlement, ses codes, qui soudain bascule dans le faits divers: deux patients viennent d'y être occis, l'un dans le parc, l'autre sous un lit.

Le commissaire Czerny, sorte de Maigret nantais, comme lui débonnaire et finaud, voire d'une autre époque que le 21e siècle, vient y mettre son nez, en compagnie de ses adjoints Mazurelli et Carol Joly, dite Joss. Le voisin de chambre de l'un des tués est vite soupçonné, et le père de l'autre mort, un fils de famille antipathique, a tendance à vouloir étouffer l'affaire, et pas seulement à cause du scandale que provoquerait, dans la bonne bourgeoisie nantaise, la présence dans un établissement psychiatrique de son rejeton. 

Dans une galerie de portraits pittoresques et attachants, que l'auteur Hervé Sard ("La mélodie des cendres", voir dans cette même rubrique) prend sous son aile avec tendresse, Czerny et son équipe, appuyés par la police scientifique, s'appuie sur l'observation des faits, sur les liens existant entre différents personnages et protagonistes, à défaut de pouvoir compter sur des personnes cartésiennes. Dans une clinique psy, on le sait, les "fous", les écorchés vifs de la vie, les alcoolos et autres laissés pour compte d'une société implacables, se croisent tous, à la lisière du monde réel, formant finalement un monde clos où chacun essaye de survivre comme il peut peut, avec sa vérité et ses certitudes, pas forcément compréhensibles à tous. Mais comme les enquêteurs sont en général bordés de logique et de déductions, à commencer par Czerny, l'écheveau des faits va se démêler peu à peu, du côté de Waldeck et de la chapelle-sur-Erdre autant qu'à Kerande.

Et si, dans ce magistral "Vol au-dessus d'un nid de coucous" à la sauce sardesque, mijotée à la salicorne et à la fleur de sel, ce n'était pas de chacun de nous dont il s'agirait, avec nos fêlures, nos obssessions, nos névroses? C'est ce qui rend "Morsaline", insuline de notre esprit, si nécessaire et finalement incontournable, avec son humour et son allant!


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